Un petit tour à Lyon vendredi soir, pour assister à la cérémonie proutocolaire de remise des prix de l’ASAC (association de soutien à l’animation culturelle) qui organisait ses Joutes littéraires. L’évènement, présidé par Alain Cros, le responsable de l’association, s’est tenu dans les locaux de la mairie du 6e, en présence de tout ce que Lyon compte d’amateurs éclairés de poésie.
éclairés, les amateurs !
Le concours comportait une section « Nouvelle », ce qui occasionna ma participation. La soirée fut animée par le comédien Michel Le Royer (dont les générations antérieures à la mienne se souviennent sans doute : il était le héros de nombreux films et séries de cape et d’épée pour la télévision et le cinéma. Le chevalier de Maison Rouge, Corsaires et flibustiers… Homme de théâtre, ancien pensionnaire de la Comédie Française, il dirige depuis 2005 l’école de théâtre La récréation de Lyon) autour du poète lyonnais Charles André, parrain de cette édition des Joutes.
J’y retrouvai mes joyeuses camarades maudauteuriennes, Emmanuelle Cart-Tanneur et Ludmila Safyane, écripasvaines lyonnaises – enfin du coin, quoi ! venues en voisines.
La cérémonie commença par un vibrant éloge de Charles André par une sémillante dame ressemblant un peu, de loin et sans mes lunettes, à un mix entre Ségolène Royal et Simone Veil ( je cite de mémoire) :
- Pourrait-on dire que votre poésie est la respiration du cœur, ou le souffle de l’âme ? (y avait une troisième métaphore que je n’ai pas retenue) Ce à quoi le poète, qui avait du en entendre bien d’autres au cours de sa vie d’ange, répondit avec la malice qui caractérise quelquefois les vieilles et sages personnes :
- Un peu tout ça à la fois…
L’homme avait fait carrière (à un haut niveau) dans la banque, écrivant en cachette des poèmes qui parlaient de son travail (et certainement de ses collègues). Bizarrement, sans doute pour éviter les démissions en rafale desdits collègues et les procès en diffamation, il ne publia jamais cette partie de son œuvre ! S’ensuivirent plusieurs recueils de poésie, des pièces de théâtre (l’une d’elles, Ultime dialogue, est d’ailleurs jouée par Michel Le Royer et Michel Chalmeau au théâtre du Marais à Paris) qui valent sa présence ce soir et son statut de parrain de la manifestation.
La soirée se poursuivit avec la remise des prix. Yvonne Le Meur-Rollet reçut le prix du jury en poésie classique pour son très joli poème intitulé Rêve de liberté, sous les ovations du public (ou du moins de trois de ses membres déchaînés par la lénifiance de ce début de soirée – ou était-ce une tendance naturelle de notre part à l’indiscipline et au radiateur du fond de la classe, près de la fenêtre ?). Certains textes furent lus par Michel Le Royer (notamment le très mérité premier prix, Solitude, de Christine Lamy, également éminente maudauteurienne) et plusieurs élèves de son cours d’art dramatique.
Charles André, Yvonne Le Meur-Rollet et la dame hybride aux questions métaphysiques
Je reçus à mon tour, en tant que nominé, mon petit diplôme pour ma nouvelle « Un plateau de fruits amers », essayant de ne pas en faire des tonnes devant le micro vers moi tendu. Je faillis succomber à la tentation d’entonner Toto le spermato mais un regard du président me rappela à l’ordre. D’autres attendaient leurs diplômes. Les hourras déchaînés de mes comparses eurent quand même pour effet de tirer le reste de l’auditoire de leur somnolence. Sans doute certains dirent-ils à leur voisin à cet instant précis, en sortant de leur semi-coma « Tiens, t’as vu, il est vachement bien conservé, Le Royer ! » avant de s’apercevoir de leur méprise.
le président de l’ASAC, Alain Cros
A la fin de la remise des prix, quand tout un chacun se pose LA question existentielle de circonstance, à savoir « mais où qu’il est, le buffet ? », je fus hélé par un jovial « Bonjour Vieufou ! ». Il s’agissait de Jean-Paul Lamy, un autre maudauteurien, écrivain normand pur pomme. Nous devisâmes joyeusement quelques instants et Jean-Paul, plein de malice, me proposa une collaboration. Je vous tiendrai au courant si l’affaire se concrétise.
Lauréats et nominés
Après avoir sacrifié à la traditionnelle séance photo et papoté un peu avec Yvonne et Jean-Paul autour d’un verre, Emma, Ludmila et moâ-m’aime prîmes congé de tout ce beau monde.
Yvonne, en pleine négociation avec Michel Le Royer pour l’obtention d’un rôle principal dans la suite des aventures du chevalier de Maison-Rouge
Nous avions trois places pour aller voir, dans le cadre du festival Lumière, « Parle avec elle » film du réalisateur Pedro Almodovar, en la présence du maître, qui venait de recevoir le prix Lumière pour son œuvre cinématographique. L’occasion d’entendre parler espagnol et de voir Almodovar et Bertrand Tavernier (par écran géant interposé, les deux hommes sur la scène de cette salle immense n’étant à nos yeux pas plus gros que des fourmis). Je suis quand même déçu: Pedro n’est à aucun moment venu me saluer. Sans doute par crainte que je lui réclame le million de pesetas que je lui avais prêté il y a des années pour l’aider à lancer sa carrière. Il faut croire que sa mémoire a moins bien vieilli que la mienne.
Samedi matin, après un agréable café-guitare avec Emma, nous filâmes au musée de la miniature du cinéma, pour contempler entre autres décors et accessoires l’impressionnante reine Alien, retenue captive entre ces murs.
Puis, comme toutes les bonnes choses ont une fin (à part les saucisses et les bananes qui, comme chacun le sait, en ont deux), il me fallut rentrer.
dans le compartiment, je me trouvai assis en face d’un homme que je mis du temps à reconnaître, ne l’ayant vu que sur affiches : l’ancien maire de ma ville, retourné à un relatif anonymat – du moins politique – après les dernières élections, plongé dans un bouquin de Mathieu Ricard pendant une partie du trajet (je crois qu’il s’agissait de L’art de la méditation) et qui se mit à appliquer sans ronfler pendant la dernière demi-heure les préceptes lus pendant la première.
Pour ma part, je m’attelai à la lecture du recueil des nouvelles primées édité par l’ASAC pour l’occasion. Je dois dire que je fus un peu déçu. D’abord, je n’eus pas le droit à un exemplaire (ils n’en offraient qu’aux lauréats) malgré le fait que ma nouvelle se trouvât à l’intérieur. Il me fallut donc débourser les 10€ requis pour entrer en sa possession. Ensuite la qualité du recueil me laissa un arrière-goût désagréable. Mise en page déplorable (la fonction « justifier » devait être absente des logiciels de l’imprimeur), police de caractère lilliputienne, coquilles, et même grossières fautes de français émaillant certains textes. Bon, et pis aussi certaines histoires pas terribles. Heureusement, le recueil comporte l’excellente nouvelle « Aller simple pour Ispahan », d’Eric Gohier. Je m’étonne d’ailleurs que ce texte ne se soit pas mieux classé. C’eût été mérité.
NDLR : pour ceux qui étaient pas là quand la maîtresse l’a dit, les maudauteuriens c’est les habitants de la Maudauteurie, un pays à l’ouest du… Non, je déconne, c’est plutôt moi qui suis à l’ouest! Ce sont les habitants virtuels, mais écrivains bien réels, et fort talentueux, du forum d’écriture Maux d’auteurs. Voilà. C’est dit et j’espère ne plus avoir à y revenir, non mais! faut écouter des fois…