Violation de sépulture 3 décembre
La lune était pleine et la nuit déjà bien avancée. La voiture de Police se gara devant l’entrée du cimetière dans lequel tant de célébrités reposaient pour l’éternité, en ayant fini des vicissitudes de ce monde.
En apparence…
Le vieux gardien fit pénétrer les agents à l’intérieur de la petite maison.
- Bien entendu je vous ai appelés dès que je l’ai trouvé. L’était pas là lors de ma dernière ronde y a deux heures. Avec tout ce qu’il se passe en ce moment … J’ai essayé de m’approcher, mais il grogne et il bave, et pis il a essayé de me mordre, l’animal…
- Ne vous inquiétez pas, on prend la suite. Veuillez juste nous conduire sur les lieux de… du…
Les quatre agents traversèrent le cimetière en silence, marchant religieusement à la suite du gardien, passant devant des sépultures dont les noms des occupants ne leur évoquaient rien, à part pour certains une rue ou le titre d’une vieille chanson. Ils allumèrent leurs lampes-torches.
A un croisement, ils commencèrent à entendre les grognements, entrecoupés de petits cris aigus et de reniflements. Cela évoquait un sanglier, mais en plein Père Lachaise, on n’en avait pas vus depuis plus d’un siècle.
- Restez en arrière, ordonna un des policiers au gardien.
Celui-ci ne se le fit pas dire deux fois et recula même de quelques mètres. Avisant sa pelle posée contre une brouette, il s’en empara et la brandit devant lui, inquiet.
Les agents avancèrent prudemment. Un homme nu, accroupi devant une sépulture, leur tournait le dos.
Arc-bouté contre la tombe, il la cramponnait des deux mains, oscillant frénétiquement du bassin dans une parodie d’acte sexuel. Ses vêtements avaient été jetés çà et là dans l’allée.
Les borborygmes entendus plus tôt étaient en fait des mots inarticulés, difficilement reconnaissables. Il les répétait en boucle, à voix basse.
Les agents avancèrent plus près, presque à le toucher.
– C’est la tombe d’Ambroise Croizat, chuchota le gardien au jeune policier resté à côté de lui.
Ce dernier acquiesça, bien qu’il ne vît pas de quel chanteur il s’agissait. Lui écoutait du rap. Aucun flow dans la musique de vieux…
Les mots que prononçait l’homme étaient maintenant nettement plus audibles. Il avait perçu la présence des policiers dans son dos. Par précaution ils sortirent leurs tasers.
– Tiens, la Sécu, tiens les retraites, tiens les hôpitaux, tiens les chemins de fer, tiens les enseignants, tiens les fonctionnaires, tiens les flics, tiens l…
Le policier le plus proche lui mit la main sur l’épaule, ce qui déclencha chez l’individu un rugissement de colère. Il se retourna brusquement, dévoilant un faciès grimaçant, parcouru de tics nerveux. La bave aux lèvres, les yeux emplis de haine roulant dans leurs orbites, les poings serrés, il exposait aux regards des agents et du gardien horrifiés l’obscène objet sanguinolent de son pouvoir, meurtri à force de frotter contre la pierre.
– J’AI PAS FINI ! hurla-t-il.
Le policier, sur ses gardes, avait fait un pas en arrière et levé son taser, par précaution.
– Je sais, monsieur Macron, mais il faut y aller maintenant… Votre femme Brigitte va s’inquiéter…